Ce vote apporte une bouffée d’air frais aux entreprises confrontées à un calendrier réglementaire complexe en matière de durabilité. Mais cette pause ne marque pas la fin du chemin.
Bien au contraire, elle ouvre une nouvelle phase d’ajustement stratégique.
🔁 Un report ciblé, pas une remise en question de la transformation
La proposition stop-the-clock prévoit :
Un délai de 2 ans pour l’entrée en vigueur de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) et de la Taxonomie européenne, pour les entreprises qui ne sont pas encore dans le champ d’application
Un délai de 1 an pour la CSDDD (Corporate Sustainability Due Diligence Directive)
Ce report ne concerne donc pas les entreprises déjà soumises à la CSRD depuis 2024, notamment les grandes entreprises cotées. Pour les autres, cela offre un répit stratégique.
🧭 Ce que la CSRD continue d’exiger – sans changement
Pour rappel, la CSRD remplace progressivement la NFRD (Non-Financial Reporting Directive) et impose un reporting plus structuré, normé et vérifiable. Parmi ses exigences majeures qui restent inchangées, on retrouve :
✅ Le principe de double matérialité : les entreprises doivent rendre compte à la fois de l’impact de leurs activités sur l’environnement et la société (matérialité d’impact), mais aussi de l’impact des enjeux ESG sur leurs performances économiques (matérialité financière).
✅ Le recours à des normes harmonisées (ESRS), définies par l’EFRAG
✅ La vérification obligatoire des informations par un auditeur externe
✅ Un périmètre élargi à terme, couvrant également les filiales non européennes des groupes établis dans l’UE
En d’autres termes : la direction stratégique de l’Europe sur le reporting de durabilité reste intacte.
🧩 Que reste-t-il à négocier dans le paquet Omnibus ?
Le paquet Omnibus I va bien au-delà du simple report. Il ouvre la voie à une révision potentielle en profondeur du cadre réglementaire.
Les points encore en discussion incluent :
🔄 La réduction du nombre d’entreprises concernées : le seuil envisagé pour la Taxonomie est très élevé (1 000 salariés et 450 M€ de chiffre d’affaires), ce qui exclurait une grande partie du tissu économique.
📉 L’allègement du contenu du reporting : suppression des exigences jugées « faibles en matérialité », recentrage sur les données quantitatives.
🛡️ Un débat sur la portée des sanctions et le rôle des audits tiers : la BCE, notamment, s’inquiète d’un affaiblissement des garanties contre le greenwashing.
🤝 Un clivage politique fort : certains eurodéputés considèrent le projet comme une déréglementation excessive, d’autres veulent aller plus loin dans la simplification administrative.
Le texte actuel du paquet Omnibus n’est donc ni finalisé, ni garanti. Il pourrait évoluer sensiblement dans les prochains mois, sous la pression croisée des États membres, des institutions européennes, des entreprises et des ONG.
⏱️ Ce que les entreprises doivent faire maintenant
Si vous n’êtes pas encore dans le champ de la CSRD, vous avez désormais jusqu’en 2028 pour vous y conformer. Mais ce sursis n’est pas un moment pour relâcher l’effort – c’est une opportunité stratégique.
Voici nos recommandations :
✅Cartographier vos obligations : êtes-vous concerné à court, moyen ou long terme ? Par la CSRD ? La Taxonomie ? La CSDDD ?
✅Mettre en place une gouvernance ESG robuste : c’est le socle indispensable pour tout reporting crédible.
✅Anticiper la double matérialité : ce pilier central de la CSRD ne sera pas abandonné. Commencez vos analyses dès maintenant.
✅Structurer vos données ESG : centralisation, fiabilisation, auditabilité – ce travail prend du temps.
✅Suivre les évolutions réglementaires : notamment les nouvelles normes ESRS attendues d’ici fin 2025, applicables dès 2027
🧩 En conclusion : une pause tactique, mais pas une sortie de route
Le vote stop-the-clock est une reconnaissance des difficultés de mise en œuvre rencontrées par de nombreuses entreprises. Il apporte du temps, mais il n’est pas une marche arrière.
L’ambition européenne en matière de durabilité reste intacte. Elle s’inscrit dans une logique de compétitivité long terme, d’attractivité des marchés financiers, et de prévention des risques extra-financiers. Les entreprises qui sauront anticiper et s’adapter intelligemment seront mieux armées pour naviguer dans les transitions à venir.
🧭 Vous voulez y voir plus clair?
Contactez-nous, pour articuler avec vous un plan permettant de mettre ce temps de pause à profit, et - plus que jamais - utiliser les leviers de la décarbonation et la transition vers un modèle plus durable pour rendre votre entreprise plus forte économiquement et plus résiliente.